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Que faire de l’eau utilisée pour rabattre les fibres d’amiante ? – Réponses d’experts avec BET2C


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Thomas Lesser, dirigeant de BET2C, répond aux questions techniques sur le sujet amiante à l’occasion du Grand Circuit Maîtriser l’Amiante.

Retranscription

Que faire de l’eau utilisée pour rabattre les fibres d’amiante ?

Il ne faut pas se leurrer, on est dans un environnement – en exagérant un peu – qui « baigne dans l’amiante ». Si on fait des prélèvements d’air, le fond de concentration de l’amiante dans l’air n’est pas à 0. Aujourd’hui, la limite est fixée à 5 fibres par litre, mais à ma connaissance la dernière fois que le fond de l’air parisien avait été mesuré, on était à 0,8 fibres par litre. Il y a encore en France des milliers, si ce n’est des millions de m2 de toitures en amiante ciment, qui lors de coups de vent sont sollicités et quand il pleut l’eau ruisselle sur les toitures en arrachant forcément un peu de fibres d’amiante et ça se retrouve dans les réseaux, les stations d’épuration et les rivières…

Il ne faut donc pas partir du principe qu’il faut capter toute l’eau que l’on va utiliser. Il faut mettre en oeuvre tous les moyens pour capter un maximum de l’eau que l’on va utiliser. Pour les engins de chantier, il faut une aire de lavage où l’on puisse collecter les eaux.

Un exemple avec une photo où l’on voit des opérateurs qui sont en train de découper un tuyaux en amiante ciment. Ce qui est bleu, c’est du surfactant qu’ils ont appliqué et on voit un peu d’eau qui brille au fond de la tranchée. Une action toute simple aurait pu être de mettre un bout de géotextile au fond de la tranchée de façon à ce que l’eau qui ruisselle au moment où ils ont coupé tombe dans le géotextile. Après on ramasse le géotextile, on considère que l’on a capté un maximum de l’amiante dans l’eau. Ne pas partir dans le dogmatisme de dire « je vais capter toutes les eaux », mais en capter le maximum, les traiter, et puis le reste ce sera comme le reste de l’eau qui ruisselle sur les toitures.

Faut-il pressuriser toutes les cabines d’engins de chantier ?

Il y a souvent des exigences par rapport aux engins de chantier : il faut pressuriser les cabines de chantier. Pourquoi ? L’INRS, en 2012, a publié un livre qui concernait un retour d’expérience sur les travaux réalisés sur la mine de Canari en Corse. Il y a eu de grands travaux menés pour sécuriser le site : c’est à dire recouvrir toute l’amiante affleurante au niveau du terrain (donc là on était vraiment à la source) de façon à sécuriser tout le site pour éviter que l’amiante s’envole avec le vent. Là, c’est sur que les opérateurs travaillaient dans une atmosphère avec des seuils importants d’amiante. Donc il y avait des moyens très lourds mis en oeuvre : tous les engins avaient des cabines pressurisées, et même les véhicules de chantier qui amenaient les opérateurs de la base vie à l’intérieur. Depuis, les organismes de prévention on tendance à imposer systématiquement des cabines pressurisées.

Je ne vais pas dire qu’il ne faut pas en utiliser, mais pour moi c’est nécessaire dans des cas bien particuliers. Ça dépend de l’organisation du chantier : si dans un chantier on arrive à s’organiser de façon à ce que la cabine ne soit jamais dans la zone de travail que j’avais figuré auparavant, si il n’est pas dans la zone dite « de travail », ça veut dire que dans cette zone là il évolue dans une atmosphère à moins de 5f/l, il n’y a pas besoin de mesures de protection particulières pour le conducteur de la pelle.

Ce que je vous ai illustré ici. On a une dépose de conduite en amiante ciment. Là, avec la rubalise, ils ont délimité la zone de travail (ils l’ont délimité au minimum et puis ils sortent des tronçons les plus compatibles possible avec la filière de traitement). Donc on voit que les opérateurs sont dans la zone de travail, ils sont susceptibles d’approcher de la canalisation, ils ont procédé à la découpe préalable… ils sont protégés. Par contre la cabine de la pelle qui sert essentiellement à manutentionner les tuyaux est en dehors de la zone de travail. On voit très bien que la cabine n’est pas pressurisée, sinon on verrait un petit bloc de clim au dessus de la cabine. Tout ça, pressurisation ou pas de la cabine, ça fait partie de l’organisation d’un chantier.

Quelles sont les innovations ?

Le secteur de l’amiante n’a pas été très innovant jusqu’à ces dernières années. Ça avait été notamment l’un des constats fait par les bailleurs sociaux à l’époque, qui trouvaient que la réglementation se durcissait mais que d’un autre côté les entreprises ne proposaient pas de solutions innovantes pour au moins maîtriser l’augmentation des coûts générés par ces renforcements réglementaires. C’est pour ça qu’en 2015 le ministère du Logement a libéré une enveloppe de 20 millions d’euros pour favoriser l’émergence de solutions innovantes. En a résulté la commission publique CEVALIA, qui vise à évaluer et à promouvoir des solutions innovantes dans la détection et le traitement de l’amiante. J’y suis représentant au titre de l’ingénierie. On étudie, on voit l’aspect amiante prévention dans ces cas là, mais on regarde aussi l’impact économique, les risques TMS…

Je vais vous montrer notamment un projet concernant les enrobés sur lequel la CEVALIA a émis un avis favorable. Quand on a beaucoup de fraisats ou des terres polluées, jusqu’à présent pour les envoyer en centre d’enfouissement les entreprises bricolaient ce que l’on appel des « body bennes », qui sont de grands sacs similaires au big bag mais adaptés à la taille des bennes. Il y avait plusieurs problème sur ce qui existait avant : c’était toujours compliqué à fermer, parfois ça résistait mal au déchargement. Donc il y a une société qui a développé un body benne avec une double sache intérieure résistante, qui se ferme par fermeture éclair, facilitant grandement la gestion des déchets, des fraisats, des déblais pollués par de l’amiante et en grande quantité.

À la CEVALIA, nous avons regardé l’application directe sur les métiers des travaux publics, mais il y aussi des instructeurs qui ont vérifié les tests de solidité qui avaient été faits sur la sache intérieure, la validé des essais de déchargement et puis l’étanchéité de la fermeture éclair.

Donc aujourd’hui, depuis le lancement du plan de recherche et développement Amiante et la CEVALIA, on voit des innovations arriver sur le marché.

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